Deuxième mois chinois

En route pour Pékin !

Il est temps de se remettre en selle. Une extension de visa d’un mois en poche, les idées fixées sur la capitale chinoise, j’enfourche mon vélo. L’hiver s’est bien installé. Au réveil, le mercure ne décolle jamais au-dessus du zéro et ça c’est quand il fait chaud. Dans ces conditions, plus possible de dormir sous tente et la chasse aux hôtels et autres endroits douillets est ouverte. Une station service, d’une petite « auberge » pour routiers aux hôtels classes mais pas trop, toutes mes nuits seront dans un abri, pas toujours avec le chauffage. Et les prix varient du simple au quintuple du double. Une nuit à dix yuan (1,50 CHF) et le lendemain ce sera 100 (je vous laisse faire le calcul hein!).

Mais loin de me plaindre, c’est toujours un moment de partage avec les locaux.  Le mieux reste ces petites pensions aux bords des routes. Souvent avec un restaurant, les gens m’accueillent avec bienveillance. Une fois le repas servis, c’est avec des gestes et mimiques que je leurs raconte mon voyage. On ouvre une carte du Monde ou de la Chine, on regarde quelques photos et on partage un moment simple. Je ne le dirai jamais assez, pas besoin de parler la même langue pour se comprendre. Avec du temps et l’envie de découverte de l’autre, tout prend un sens. La communication se fait par tâtonnement, nous trouvons notre langage, nos codes et arrivons à parler de choses simples. C’est sûr que l’on ne va pas discourir sur de grandes théories mais nous refaisons « notre » monde tranquillement.

Petite famille

Et grande famille

Cependant, le temps gâche pas mal les choses. Tout est blanc, gris. La brume est quasi omniprésente et si je vois à plus de 100 mètres, c’est un peu la révolution. Un décor peu alléchant fait de magasins aux bords des routes et d’immeubles. Je slalome entre des camions embouteillés qui sont remplis de charbon. Le quotidien n’est pas séduisant et c’est difficile de s’emballer pour cette Chine là. La neige s’en mêle, vingt centimètres tombent en une nuit, les routes se vident, je sors des grands axes et me retrouve dans les collines de campagne. Et enfin, je trouve ce que j’attends. Des champs, des gens, la vie comme je l’apprécie. Je renoue avec le plaisir de rouler malgré le tapis blanc sur la route. Tout ce fait plus tranquillement, plus intensément aussi. Les rencontres, les coups de pédales et je me sens bien. C’est ce qu’il me fallait. En traversant les vallées, je reste ébahi devant les grandes rivières gelées, je me demande comment vivent ces gens, loin de tout, sans voiture, avec ce froid si mordant ? Je découvre un des nombreux autres visages de la Chine. Celui des villages isolés qui sont bien loin de la frénésie des villes ou de la décrépitude des cités ouvrières. Mais les choses changent, et ces vallées sont le parfait reflet de ce changement. Dans les villages, presque que vieilles personnes. Tous les adultes sont dans les villes pour travailler, laissant leur enfant à leurs parents. Beaucoup de jeunes rencontrés à Pékin me l’expliqueront :

– On vient travailler ici, mon fils reste avec mes parents, je le vois deux ou trois fois par mois. C’est pour lui qu’ont fait ça.

Et c’est certaine fois plus de mille kilomètres qui séparent ces familles. Une pensée très difficile à comprendre pour un occidental comme moi, qui a grandi avec sa famille. La Chine va vite et les gens n’ont pas envie de rester à la traîne mais ont- ils le choix ?

La neige s'invite à la fête

Petit temple et sa cascade de glace

Au loin, vous la reconnaissez?

La campagne me réserve une dernière surprise. La grande muraille, l’emblème du pays, se montre sur les montagnes, juste à côté de moi. En la suivant, je peux apprécier son trajet qui s’efforce de suivre les arrêtes. C’est un pur émerveillement. Et c’est là que lors d’un coucher de soleil, avec un paquet de biscuits au chocolat, je me dis :

– Le bonheur c’est quand même facile, un paquet de biscuits et un coucher de soleil (sur la muraille de Chine…) et voilà !

Me voici réconcilié avec la Chine, mais impossible d’avoir un avis tranché sur ce pays. C’est sûr, I will be back !

c'est simple non?

Puis Pékin est en vue. Je m’en rends compte quand je demande aux passants mon chemin :

– Beijing ?

Et j’ai droit à de grands gestes qui me montrent tout droit. C’est tout près et je suis heureux et un peu inquiet par cette situation. Pékin a toujours été l’objectif de ce voyage. Lors de sa préparation, c’était :

-Bon Pékin et après les Etats Unis en bonus pour rentrer.

Mais entre le départ et maintenant, 20 mois et 22’500 km ont passés… L’itinéraire pour la Chine a changé maintes fois, ma vision des choses et mes désirs aussi. Alors plus la ville s’approche, plus le malaise s’accroît. Ma tête me dit :

-Mon gars, tu y es, c’est la fin, après ça, tu peux rentrer !

Mon cœur, lui, vois les choses différemment :

– Est-ce qu’on a fini ? Est- ce que c’est le temps de rentrer ?

Et pendant les derniers kilomètres, la tête et le cœur vont débattre de la suite, pendant que moi, je pédale allégrement jusqu’à l’objectif. Arrivé à bon port, nous trouvons un compromis. Ce n’est pas le moment de rentrer, j’ai encore envie, je n’ai pas le sentiment d’avoir fini… Prochain objectif, la Corée du Sud et le Japon, après on verra.

Nous passons ensemble un contrat à durée déterminée de quelques mois, j’ai un autre objectif, les deux autres ont du temps pour peaufiner leurs arguments et j’ai d’autres idées de toute façon !

Mais revenons à Pékin. Pékin et ses 8 périphériques, Pékin est ses voitures grouillantes partout (et presque plus de vélos…), Pékin et sa police omniprésente, Pékin et sa place Tian’an men. Place historique, elle trône au centre de la ville. Moi qui pensais que cela allait être dur de trouver mon chemin dans cette mégapole de plus de 14 millions d’habitant. Non, toutes les routes mènent à Rome (à la place, je veux dire). Une photo souvenir sur la plus grande place du monde avec mon vélo ?

-Interdit, me dit la police…

Tant pis, cela ne change rien, je suis heureux. De chez moi à Pékin, avec un vélo. J’ai réalisé un rêve. Aucun regret, je suis arrivé au bout de ce défi. Et dans CETTE ville, devant CETTE place, je savoure ce moment unique qui m’appartient. Heureux…!

La suite, c’est 15 jours de visites, de repos, de rencontres et dans le désordre et pour résumé :

  • La cité interdite
  • La place Tian’an Men (mais sans le vélo!)
  • Le musée national
  • Le Temple des Lamas
  • Les réparations d’urgence pour Panada
  • La demande et la validation d’une extension de visa (encore…)
  • La présentation du projet dans un magasin de vélo devant une cinquantaine de personnes avec une interprète rien qu’à moi (!)
  • Un spectacle de kung-fu
  • Un concert de blues d’un cyclotouriste local
  • Une vraie fondue chinoise pour le nouvel an
  • Un noël avec trois suissesses (et rien que moi!)
  • Un nombre assez indécent de grasses matinées
  • etc…

La place Tian'an Men

La place Tian'an Men

Une tortue qui garde la cité interdite

La cité interdite

Vue hivernal sur la cité interdit et Pékin

Le temple des Lamas

Présentation du projet, merci aux personnes d'être venuent si nombreuses!

La suite : un mois encore en Chine, direction le Sud-Est pour trouver un bateau pour la Corée du Sud.

Et quelques lignes pour remercier tous les gens qui m’ont soutenu, qui continuent à me soutenir et qui me font avancer. Ma famille, mes amis et des anonymes qui par leurs messages, leur amitié et leurs encouragements m’ont permis d’arriver jusque-là. Et qui me permettront d’aller encore plus loin. Alors merci à vous et comme le veut la formule :


Bonne Année 2013 !

Chris

4 Réponses à Deuxième mois chinois

  • Mimi

    Kiriiiiis t’es le meilleur 🙂 C’est magnifique ! Bravo bravo et j’ai presque envie de dire « canaille kissïou » pour l’occasion ! Repose toi bien pendant ton mois en Chine 🙂
    PREND SOIN DE TOI !

  • Luc

    Bof bof les pantalons sur la dernière 😉

    Magnifique périple cher ami, magnifique aventure!

    Qu’elle se poursuivre autant que tu le souhaites.

    Des becs

    V+L

  • Amandine

    BRAVOOOOO Chris!!!! Tu l’as fait!!! Vraiment contente pour toi, de la Suisse à la Chine… Quel périple ! Tu peux franchement être très fier de ce que tu viens d’accomplir 🙂 Plein de belles choses à toi pour cette nouvelle année qui débute, et je te souhaite encore une longue et belle route, bon vent !

  • Yalena

    Excellent Chris ! J’aime toujours autant te lire et tes photos sont vraiment belles. C’est un vrai soulagement de lire que tu continues le voyage, merci 🙂 Et bonne année !

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