« Je rêve d’une humanité qui n’aurait à cœur que le bonheur de son voisin de palier. »
Daniel Pennac, La petite marchande de prose
À peine arriver dans l’Utah que je remarque quelque chose de différent avec les états précédents : les gens. Je ne veux pas créer une polémique en disant que les Américains ne sont pas sympas ou gentils, non ce n’est pas le cas, mais ils ont une tendance à rester dans leur coin, à s’occuper de leurs affaires et surtout à ne pas perdre de temps. Oui, parce que les gens n’ont pas tellement de temps apparemment, à part moi bien entendu.
Et quand j’arrive à Saint-Gorge, première ville de l’Utah, ben les gens s’arrêtent et parlent avec moi. Tout d’abord, cette blonde plantureuse habillée d’un ensemble bien trop moulant et qui ne fait pas du tout ses quarante ans. À la sortie du supermarché, elle m’aborde et me pose un tas de questions sur mon voyage. J’en reste presque sans voix! et puis les types du magasin de sport, ils font attendre les clients pour que je finisse mon histoire. Et ainsi de suite! Plein de rencontres chaleureuses et simples. On prend le temps de parler, de se connaître et on s’écoute. L’écoute, une valeur qui n’est pas fondamentale dans notre société.
Voilà ce qui me manquait depuis un bout de temps, partager spontanément avec les personnes qui vivent dans le coin. Ce n’est pas toujours par la parole, c’est parfois un pouce levé depuis une voiture, un sourire depuis un trottoir. Les gens observent et sont plus ouverts que sur la côte.
Pour exemple? Ce couple d’Escalente que je croise dans une station-service. Michelle et Ed boivent leur café pendant que je remplis mon thermos d’eau chaude.
– C’est à vous le vélo?
– Oui…
– Courageux avec la neige qui est tombée!
– Bah, cela donne un certain charme aux paysages!
Et de file en aiguille, de conseils en anecdotes, ils m’invitent chez eux pour le lendemain. Première fois que cela m’arrive depuis que je roule en Amérique du Nord. Une invitation spontanée. Et le soir dit, c’est spaghettis à la crème, saucisses et une nuit de discussions. Un de ces moments qui font ce voyage.
Un autre exemple?
À Moab, je suis hébergé par TeriAnn via le réseau Warmshower. Le soir de Noël, elle me convie à une fête donnée par des voisins. Un vrai Noël comme j’avais envie de le faire. À manger, à boire et plein de moments à refaire le monde! Et la famille qui reçoit m’emmènera deux jours plus tard faire le tour du parc national de Canyon Land et m’invitera pour un autre souper!
Un dernier exemple?
À Hurricane, après avoir fait le plein de mon thermos dans une station-service (oui, l’hiver frappe fort et je bois beaucoup d’eau chaude) un type commence à me parler. Je lui explique mon voyage et lui dit que je prends la direction de Zion. Il me tend sa carte de visite et me dit:
– Je connais bien la région et j’ai un pick-up, si tu as le moindre problème où que ce sois en Utah, appel moi et je viens te chercher.
Texto voilà ce que cet inconnu me dit après cinq minutes de bla bla.
Oui, les habitants de l’Utah sont des crèmes!
Il y a plein d’autres exemples, ce couple qui s’arrête pour me donner une plaque de chocolat, ces gens qui veulent tout savoir sur mon voyage dans un café, le monsieur qui m’emmène dans sa voiture pour voir le coucher de soleil dans le parc de Bryce, etc.
Toutes ces personnes avec qui j’ai partagé du temps ne viennent pas forcément du coin et pour la plupart ne sont pas nées ici. Touriste, retraités, travailleur, il y a de tout. Et je ne sais pas si c’est la beauté des paysages, le froid mordant de l’hiver ou bien tout simplement une vie plus simple, mais j’ai senti un changement ici. Une envie d’aller vers l’autre. Et cela m’a fait du bien, simplement. Un grand merci à tous ces gens pour avoir pris le temps, pour avoir souri et pour avoir été eux-mêmes avec moi.
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